Elevage bovin laitier au Maroc
Rentabilité des élevages
laitiers au Maroc
Introduction
L'étude
porte sur une vingtaine d’exploitations de taille moyenne situées
dans le périmètre irrigué du N'Fis, couvert en grande
partie par les plantations d’oliviers et situé à proximité
de la ville de Marrakech. Il couvre une superficie d’environ 300 ha, soit
1,4% de la superficie agricole utile totale de ce périmètre.
La superficie moyenne par exploitation est de 15 ha et la plupart des agriculteurs
enquêtés possèdent entre 6 et 24 ha. Seules deux exploitations
disposent d'une superficie supérieure à 30 ha. Les principaux
statuts juridiques des terres sont le melk et le guich. Ce dernier domine
dans les communes de Tnine Oudaya et de Tamesloht.
Les plantations
occupent les deux tiers des superficies cultivées. Elle sont suivies
des céréales et des fourrages avec respectivement 17 et 16%,
le maraîchage couvre moins de 1% de ces superficies. Ces cultures sont
principalement pratiquées en sous étage, en association avec
les oliviers qui couvrent la moitié de la superficie arboricole, le
reste est occupé par les abricotiers et les pommiers.
Les troupeaux
sont composés en moyenne de 8 vaches laitières. Les valeurs
extrêmes sont respectivement de 14 et de 5 têtes. 80% des éleveurs
de l'échantillon possèdent entre 6 et 10 vaches. La structure
génétique du troupeau est caractérisée par la
prédominance des races améliorées avec 98% de l'effectif
total (Pures: 62%; Croisées: 36%) contre 2% seulement pour la race
locale.
Les bâtiments
d'élevage sont plus ou moins adaptés aux conditions de la région.
Ils sont dans la majorité des cas construits en pisé et en
dur. Toutes les exploitations sont dotées d'au moins un puits, souvent
équipé de motopompe (3 à 6 pouces). Ces puits sont destinés
à un double usage: domestique et d'irrigation de complément.
Les débits fournis se situent en moyenne entre 8 et 12 l/s.
La mécanisation
des travaux agricoles est relativement avancée, à l'exception
des petites exploitations (moins de 5 ha) qui forment 78% des unités
de ce périmètre. Sur les vingt exploitations de l'échantillon,
sept disposent d'un tracteur et de son matériel d'accompagnement (charrues
à disques, cover crop). La majorité des agriculteurs louent
des tracteurs auprès des particuliers à raison de 90 à
120 Dh par heure de travail effective. En revanche, la traction animale est
particulièrement importante dans les petites et moyennes exploitations.
Elle est utilisée dans le transport des fourrages verts ainsi que
dans le binage.
Le mode
de faire valoir direct est dominant. La conduite du troupeau et l'exploitation
des fourrages est confiée à une même personne. Celle
des cultures est attribuée à un membre de la famille. 60% des
exploitations emploient un salarié permanent pour s’occuper de l’élevage.
Résultats techniques des élevages
laitiers
Les données
recueillies sur ces exploitations constituent seulement des ordres de grandeurs
approximatifs, étant donné l'absence d'un système d'enregistrements
des données (contrôle laitier). Elles permettent cependant d’en
délimiter les grands traits.
Des élevages orientés vers
la production laitière
La composition
des troupeaux montre l’importance accordée à la production
laitière. Le rapport entre le nombre de vaches laitières présentes
et l'ensemble du cheptel bovin exprimés en UGB est de 72,4% (Tableau 1).
Les vaches
laitières sont à leur la 4ème lactation, ce qui correspond
à la phase où leur productivité est maximale. Cependant,
l'âge au premier vêlage se situe entre 30 et 40 mois. Ceci montre
que la composition des troupeaux est hétérogène du point
de vue génétique.
Des taux de renouvellement et de réforme
faibles et hétérogènes
L’analyse
de la variation des effectifs des vaches laitières au cours de la
campagne 1994-95 permet de faire un double constat: les taux de renouvellement
et de réforme sont faibles d’une part et hétérogènes
d’autre part. Le premier est en moyenne de 9% et le second de 13%. Ce dernier
varie entre 0% et 41% (Tableau 1).
Les raisons
invoquées par les agriculteurs pour la réforme des vaches laitières
sont, en premier lieu, liées aux problèmes de reproduction
des animaux, suivis de ceux de la production laitière et des disponibilités
alimentaires. Ces problèmes sont fortement ressentis par les petits
producteurs surtout en période de sécheresse, caractérisées
par la flambée des prix des sous-produits (son de blé, pulpe
sèche de betterave...).
Une fécondité et une mortalité
des veaux peu maîtrisées
L’analyse
des résultats de la reproduction montre l’existence de deux insuffisances:
l’Intervalle entre vêlages est relativement long. Il est de 14 à
16 mois au lieu de 12 mois selon la norme optimale, soit la production d'un
veau par vache et par an.
Le taux de mortalité est en moyenne de 14%. Il varie cependant entre
0 et 30%.
Seul,
le taux de prolificité est satisfaisant. En moyenne, il est de 96%.
Il traduit un bon déroulement des mises-bas chez la quasi-totalité
des vaches laitières.
Une alimentation peu coûteuse, riche en fourrage et pauvre en concentrés
Une alimentation peu coûteuse, riche en fourrage et pauvre en concentrés
L’alimentation
est basée sur l'utilisation des aliments grossiers. Ces derniers représentent
59% des apports énergétiques et 60% des charges d'alimentation.
Les niveaux des chargements sont peu élevés en raison notamment
de la faiblesse de la productivité des cultures fourragères.
Trois aliments assurent l'essentiel de la ration de base: la luzerne, le
bersim et la paille. Les fourrages de récupération comprennent
les mauvaises herbes des céréales, celles qui poussent sous
les arbres fruitiers et les chaumes. Ils sont pâturés par les
animaux de trait. La paille mélassée est rarement utilisée.
Les aliments concentrés sont composés du son de blé,
de la pulpe sèche de betterave et occasionnellement des aliments composés.
La superficie
moyenne occupée par les cultures fourragères est d'environ
2,7 ha par exploitation. La luzerne s’étend sur 1,4 ha, soit 54% de
la superficie fourragère. Généralement, les fourrages
sont distribués en vert. Cependant, certains producteurs déclarent
qu'en bonne année climatique, une partie de la production des luzernières
est utilisée sous forme de foin en période de soudure. Cette
phase se situe entre novembre et février.
L'exploitation
de la luzerne dure 10,5 mois et s’étend du milieu du mois de février
à la fin de novembre. Le nombre de coupes dépasse souvent 8.
Le bersim est coupé 5 fois par an. Il est récolté entre
le milieu de novembre et la première décade du mois de mai.
La distribution de la paille se fait tout au long de l'année en tant
qu'aliment grossier ou en tant que litière. Sa contribution dans l’alimentation
est importante en hiver.
Les niveaux
de chargements sont moins denses que ceux qui sont pratiqués dans
les élevages laitiers les plus intensifs. La stratégie adoptée
par les éleveurs consiste à réguler la taille du troupeau
en fonction du niveau de productivité des cultures fourragères
afin de pouvoir satisfaire les besoins alimentaires au moindre coût,
notamment en réduisant les achats d’aliments concentrés. Les
chargements les plus faibles (0,64 à 1,33 UGBB/SAU) sont observés
dans les exploitations dont une partie importante de la superficie fourragère
est conduite en sous-étage.
Consommation de fourrages
Les quantités respectives de paille et de fourrages verts distribuées aux vaches laitières sont de 2 et 10,7 tonnes par vache présente (Tableau 2), soit l'équivalent de 5,5 kg de paille et de 29 kg de fourrages verts par jour et par vache présente. Les apports quotidiens peuvent varier, suivant les périodes, les exploitations et leurs disponibilités dans une fourchette qui va de 10 à 40 kg de bersim et de luzerne et de 4 à 8 kg de paille.
Les quantités respectives de paille et de fourrages verts distribuées aux vaches laitières sont de 2 et 10,7 tonnes par vache présente (Tableau 2), soit l'équivalent de 5,5 kg de paille et de 29 kg de fourrages verts par jour et par vache présente. Les apports quotidiens peuvent varier, suivant les périodes, les exploitations et leurs disponibilités dans une fourchette qui va de 10 à 40 kg de bersim et de luzerne et de 4 à 8 kg de paille.
Les apports
énergétiques sont en moyenne de 1.268 UF par vache présente
et par an pour les fourrages et de 360 UF pour la paille. Ce qui constitue
respectivement 46% et 13% de l'énergie totale. L'importance des apports
énergétiques d'origine fourragère s’explique par le
souci des éleveurs d’être le moins dépendants possible
du marché des aliments concentrés, en raison des fortes fluctuations
des prix en période de pénurie.
Le coût
des fourrages verts représente 29% des charges totales d'alimentation.
Il s'élève à 1573 Dh par vache présente. Le coût
de la paille est du même ordre de grandeur. Le coût de l’alimentation
fourragère varie cependant fortement d’une étable à
une autre. Il fluctue entre 745 Dh et 2.990 Dh. Cet écart s'explique
à son tour par la variabilité des superficies fourragères
(de 1,5 à 5 ha) et par celle des rendements des cultures (entre 35
et 53,5 T/ha).
La consommation des aliments concentrés
Les aliments
concentrés (son de blé et pulpe sèche de betterave)
servent à combler, en partie, le déficit alimentaire souvent
observé durant la période hivernale (décembre-janvier).
Pour la majorité des exploitations laitières, la pulpe sèche
de betterave sert rarement à compléter la ration en été.
Les aliments composés sont surtout utilisés dans le cadre des
actions étatiques de sauvegarde du cheptel en année de sécheresse.
Cependant, les dotations reçues par chacune des exploitations enquêtées
sont relativement faibles et ne dépassent guère 5 à
6 qx.
En moyenne,
chaque exploitation enquêtée utilise annuellement une dizaine
de tonnes d’aliments concentrés soit un peu plus d’une tonne par vache
présente ou près d’un millier d’unités fourragères
par tête. Bien que ces moyennes cachent en fait une grande variabilité,
cette consommation ne représente que la moitié de celle observée
dans élevages les plus intensifs dans la même région.
Elle se traduit par un coût inférieur par rapport à ces
mêmes élevages. En moyenne, ce coût est de 2.474 Dh par
vache (Tableau 1). Toutefois, le coût
de l'unité fourragère est relativement élevé
dans ces élevages non contrôlés. Il est de 2,20 Dh/UF
contre respectivement 1,66 et 1,87 Dh/UF dans le cas des élevages
pépiniéristes dans le Haouz et dans le Gharb. Cette différence
peut être attribuée à la nature et à aux fluctuations
des prix de ces aliments.
La quantité
de concentrés consommés par litre de lait est également
inférieure à celle enregistrée dans les élevages
intensifs. Elle est de 0,5 kg soit un apport énergétique de
0,47 unités fourragères par litre de lait. Cet apport permet
de satisfaire les besoins énergétiques nécessaires à
la production d'un litre de lait avec un léger dépassement de
0,04 Ufcc/litre en supposant que les besoins d'entretien de la vache sont
totalement couverts par la ration de base.
Le coût
de cette alimentation est en moyenne de 1,01 Dh par litre de lait produit.
Il représente 45% environ du coût alimentaire total contre 55%
pour les aliments grossiers, soit 1,22 Dh par litre de lait produit. Il est
du même ordre de grandeur que celui des élevages intensifs.
Cependant, les valeurs extrêmes sont respectivement de 0,69 et 1,37
Dh par litre. L'ampleur de cet écart entre la valeur minimale et la
valeur maximale s’explique par une mauvaise utilisation des aliments concentrés.
La productivité par vache de l’exploitation qui dépense le
plus en concentrés est de 2.301 litres. Elle est très proche
de celle dont les dépenses sont les plus faibles (2.189 litres/1.506
Dh). La première dépense 3148 Dh alors que la seconde dépense
deux fois moins. L’écart entre ces charges s’explique par une mauvaise
valorisation des concentrés par les vaches laitières de la
première exploitation due à une mauvaise adéquation
entre les besoins et les apports selon les stades de lactation. Il reflète
également le faible potentiel de production des animaux de cet élevage.
Il correspond également à une ration alimentaire déséquilibrée
(excès d'énergie par rapport aux MAD). Il est aussi le résultat
de ruptures répétées en concentrés. Un renforcement
des dotations distribuées après chaque cessation ne donne pas
forcement lieu à une augmentation de la production dans l'immédiat,
et encore moins à une compensation des pertes antérieures engendrées
par les ruptures d’approvisionnement.
Une productivité insuffisante et
hétérogène
D’une
manière globale, la productivité des vaches laitières
est insuffisante, compte tenu des opportunités offertes par le milieu
(périmètre irrigué, proximité de la zone urbaine)
et du potentiel du troupeau bovin exploité (98 % des vaches sont de
race améliorée). Pourtant, la production du lait améliore
le revenu global puisqu’elle représente 45% du revenu agricole et constitue
une source de recettes régulières le long de l’année.
Les recettes sont utilisées pour faire face aux achats d’aliments du
bétail, aux dépenses des cultures et pour couvrir les besoins
de la famille.
La production
annuelle moyenne est de 20000 litres avec un écart élevé
entre les valeurs extrêmes (Tableau
3). Celui ci s’explique par les différences dans la taille et la
composition des troupeaux, par des apports inégaux en aliments concentrés
et par conséquent par des productivités différenciées.
Le rendement en lait par vache présente de l’exploitation la plus
performante est le double de celle qui est la moins efficiente.
La production
moyenne par vache présente de 2.400 litres. La valeur maximale est
de 3.572 litres contre 1.450 litres pour la valeur minimale. La quantité
moyenne du lait économique par vache présente est de 1.600
litres, avec une faible dispersion autour de cette moyenne (Tableau 3).
Rentabilité des élevages laitiers
L’étude
de la rentabilité repose sur l’analyse des charges, des produits et
des marges brutes par exploitation et par vache présente. Trois niveaux
de marges ont été définis séparément: la
marge brute lait, la marge brute de la production animale et la marge brute
globale de l’élevage. La première correspond à la valeur
du produit lait diminuée des charges variables liées à
l’alimentation et à la main d’oeuvre du sous atelier «vaches
laitières». Le but étant d’effectuer une analyse isolée
du «produit lait». La deuxième représente la différence
entre la valeur de l’ensemble des produits des élevages laitiers,
non compris le fumier, et des charges totales de l’élevage. Ce niveau
de marge a été défini dans le but de comparer les résultats
de ce travail avec ceux obtenus dans d’autres régions et dans lesquels
le produit fumier n’a pas été pris en considération.
La troisième marge tient compte de la totalité des charges et
des produits des élevages laitiers y compris le fumier.
Les charges
Les charges
variables moyennes par exploitation s’élèvent à 77000
Dh et à 9600 Dh par vache. L’alimentation absorbe 82% des charges
opérationnelles, la main d’oeuvre 16% (Tableau 4). La rentabilité du
système laitier dépend par conséquent de la manière
dont sont gérés ces deux postes. Les soins vétérinaires
et les frais de l’insémination artificielle sont négligeables.
Ils connaissent cependant la dispersion la plus forte.
Les charges
d’alimentation comprennent les dépenses en concentrés, le coût
de production des cultures fourragères et la valeur de la paille achetée
ou produite sur l’exploitation. Les concentrés représentent
le tiers des charges de l’élevage. La paille et les fourrages revêtent
la même importance. Ils occupent chacun le quart de ces charges.
Les charges
dues à l’utilisation de la main d’oeuvre sont en moyenne de 11.600
Dh par exploitation et de 1500 Dh par vache. La majeure partie des éleveurs
n’emploie qu’un seul ouvrier pour conduire à la fois le troupeau bovin
(8 têtes en moyenne) et s’occuper des cultures fourragères.
Les charges
dues à l’allaitement des veaux par leur mère sont en moyenne
de 5600 Dh par étable et de 700 Dh par vache présente, ce qui
représente un manque à gagner non négligeable. Les charges
de transport des animaux achetés ou vendus, du lait et des aliments
achetés sont de 500 Dh par exploitation.
Les produits
Le produit
total de l’élevage comprend les recettes de la vente du lait et des
animaux ainsi que la valeur des veaux et de celle du fumier. La variation
de la valeur des effectifs n’a pas été prise en considération
dans l’évaluation du produit total de l’élevage, en raison
de l’absence d’informations précises concernant la valeur du cheptel
entre le début et la fin de la campagne et en particulier celles relatives
au poids des animaux.
Les recettes
provenant de la vente du lait représentent près de 40% du produit
brut de l’élevage. Elles sont en moyenne de 50000 Dh par exploitation
et de 6000 Dh par vache (Tableau 4).
Elles constituent une source de trésorerie régulière
et essentielle pour le financement des achats d’aliments concentrés,
de certains intrants et la satisfaction des besoins de la famille.
Les ventes
d’animaux contribuent pour un plus du quart dans le produit total de l’élevage
avec une moyenne de 36.000 Dh et une recette de 4500 Dh par vache. Elles
concernent les vaches de réforme, souvent de race locale en vue d’introduire
des races améliorées, et les jeunes animaux issus de l’élevage
des veaux nés sur l’exploitation. Ces derniers se nourrissent essentiellement
de la paille et des mauvaises herbes prélevées sur les champs
de culture et des plantations, ce qui est loin de leur assurer une alimentation
équilibrée adaptée aux besoins de leur engraissement.
Les ventes
d’animaux sont destinées à couvrir les achats d’aliments de
bétail surtout en en période de sécheresse ainsi qu’à
financer les frais des cultures. Elles permettent également d’éviter
de recourir à des emprunts bancaires jugés onéreux par
les producteurs.
En moyenne,
la valeur du fumier est estimée à 23000 Dh par exploitation
et à 2900 Dh par vache, ce qui représente 18% du produit total
de l’élevage. L’importance de ce produit vient de l’augmentation de
son prix qui est passé en quelques années de moins 50 Dh à
plus de 150 Dh la tonne dans la région. Cette évolution résulte
de l’extension de l’arboriculture, des cultures en sous étage et de
l’introduction de certaines cultures maraîchères très
exigeantes en fumier organique telle que la pomme de terre. La valeur du
fumier est estimée sur la base des normes avancées par Mazouz
relatives Les quantités de fumier produites dépendent du mode
de stabulation et de la catégorie des animaux.
La valeur des naissances est en moyenne de 13500 Dh par exploitation et de 1700 Dh par vache, ce qui représente 10% du produit total de l’élevage. Elle est évaluée sur la base des prix recueillis lors des enquêtes relatives aux prix des veaux. Ces derniers varient suivant la race, l’état et la conformation de l’animal. Le prix d’un veau de race locale varie dans une fourchette de 1.000 à 1.500 Dh, celui d’une race croisée entre 2.000 et 2.500 Dh, alors que celui d’un veau de race pure oscille dans un intervalle allant de 2.000 à 3.000 Dh.
La valeur des naissances est en moyenne de 13500 Dh par exploitation et de 1700 Dh par vache, ce qui représente 10% du produit total de l’élevage. Elle est évaluée sur la base des prix recueillis lors des enquêtes relatives aux prix des veaux. Ces derniers varient suivant la race, l’état et la conformation de l’animal. Le prix d’un veau de race locale varie dans une fourchette de 1.000 à 1.500 Dh, celui d’une race croisée entre 2.000 et 2.500 Dh, alors que celui d’un veau de race pure oscille dans un intervalle allant de 2.000 à 3.000 Dh.
La faiblesse
de ce produit s’explique par un taux élevé de mortalité
des veaux (16%) et par un long intervalle entre les vêlages (14 à
16 mois). De ce fait, le nombre des naissances est faible. Il est en moyenne
de 5,5 veaux par étable pour un effectif de 8 vaches présentes,
ce qui signifie que 30% des vaches n’ont pas vêlé durant la
campagne agricole étudiée. Comparée à l’optimum
technique - un veau par an et par vache - cette situation engendre des manques
à gagner qui varient entre 2.500 et 7.500 Dh par exploitation selon
qu’il s’agit des veaux de race locale, croisée ou pure. L’autoconsommation
est évaluée à raison de 4.200 Dhs par famille sur la
base de 3 Dh le litre.
Marges brutes
Marge brute lait
L’analyse
des trois niveaux successifs de marges brutes a montré que la vente
du lait est incapable à elle seule de permettre de dégager
une rentabilité suffisante. Elle est complétée par la
présentation des ratios de rentabilité. Ces derniers sont au
nombre de deux: le premier met en rapport la marge brute avec le chiffre
d’affaires, représenté par la valeur des ventes du lait et
des animaux durant la campagne observée. Le deuxième correspond
à la marge brute rapportée au produit brut.
La production
laitière est insuffisante à elle seule pour procurer au producteur
un niveau de marge satisfaisant en particulier dans les élevages à
faible productivité (Tableau 4).
En moyenne la marge brute par vache est de 730 Dh. Le coefficient de variation
de cette dernière est relativement élevé (cv=169). Il
dénote d’une grande variabilité dans la rentabilité des
élevages étudiés. La marge la plus forte est de 3086
Dh par vache contre une perte de 1776 Dh pour l’exploitation la moins rentable.
Sur les 20 élevages de l’échantillon, 6 enregistrent des marges
brutes lait négatives. Ils se caractérisent à la fois
par un faible rendement laitier et par un coût élevé des
aliments concentrés par litre de lait. Leur moyenne économique
est proche de 2.000 litres par vache. Au delà de ce seuil de productivité,
toutes les exploitations ont pu obtenir des «marges brutes lait»
positives. Ainsi, il existe une relation étroite entre cette marge
et la moyenne économique.
En outre,
le coût des concentrés par litre de lait dans les élevages
les moins productifs est compris entre 0,47 et 0,70 Dh. Il est plus faible
dans les autres élevages. Les exploitations concernées présentent
par conséquent un problème d’alimentation lié à
une mauvaise valorisation des concentrés.
Marges brutes lait viande et marges brutes
totale de l’élevage
En tenant
compte de tous les produits de l’élevage à l’exception du fumier,
la marge brute moyenne passe de 730 Dh à 3117 Dh par vache et de 302
à 1262 Dh par UGB bovine. Il est à remarquer qu’en moyenne
la rentabilité des élevages non contrôlés est
proche de celle des élevages pépiniéristes du Gharb
(Boubkri,1995). Elle est cependant inférieure à celle observée
dans les Doukkala avec 2.814 Dh/UGBB (Dahmane,1993). Par contre, elle est
supérieure à celles des élevages du même type
pratiqués dans les régions des Doukkala où elle est
de 743 Dh/UGBB et dans le Tadla 1.020 Dh/UGBB (Kendadi,1992).
La marge
brute s’améliore en incluant la valeur du fumier dans celle du produit
brut. Elle est le double de la précédante avec 50000 Dh par
exploitation et 6000 Dh par vache (Tableau
4).
Analyse des ratios de rentabilité
la rentabilité
de l’élevage laitier est satisfaisante. Ainsi, en ne tenant pas compte
de la valeur du fumier, en moyenne la part de la marge brute est de 39 %
du chiffre d’affaires et de 30 % du produit brut d’élevage . Cette
rentabilité est légèrement supérieure à
celle des élevages pépiniéristes dans le Gharb, avec
respectivement 33 % et 28%. Cette légère supériorité
s’explique par l’importance de la valeur des ventes d’animaux qui augmente
en année de sécheresse (comme ce fut le cas de la campagne
1994-95) pour faire face à la hausse des prix des aliments de bétail.
En incluant le fumier, la part de la marge brute est de 68% du chiffre d’affaires
et de 41% du produit total élevage.
Prix de revient du lait
Le prix
de revient du lait dépend de la nature de la campagne agricole dans
laquelle il a été étudié. La conjoncture climatique
de 1994-95 s’est traduite par des ventes importantes d’animaux dont les entrées
d’argent ont servi à sauvegarder le cheptel gardé sur l’exploitation,
en lui assurant un approvisionnement en paille et en aliments concentrés.
Les coûts
totaux affectés à la production du lait sont en moyenne de
4 Dh par litre (Tableau 5). Les charges
d’alimentation et de main d’oeuvre constituent à elles seules près
de 94% des charges affectées au lait dont 47% pour les aliments grossiers
30% pour des concentrés. En déduisant la valeur des sous-produits
de ces coûts, le prix de revient du litre n’est plus que de 2,02 Dh.
Les charges d’amortissement relatives aux bâtiments n’ont pas été
comptabilisées, car il s’agit souvent d’anciens locaux aménagés.
La comparaison
du prix de revient avec le prix offert par la coopérative (3,07 Dh/l)
montre que les producteurs dégagent un gain qui varie de 0,72 Dh/l
en haute lactation à 1,22 Dh en basse lactation.
Analyse de groupe
L’analyse
de groupe suppose une homogénéité des conditions naturelles,
des ressources utilisées et des systèmes de production. Elle
n’exige pas par contre une uniformité dans l’utilisation des facteurs
variables (intrants, main d'oeuvre). Cette analyse a porté sur un
groupe homogène d’exploitations situées dans le périmètre
N’Fis (rive droite) et dotées d’appareils de production plus ou moins
similaires. Il s’agit d’exploitations de polyculture élevage dont
la superficie varie de 5 à 40 ha, dont la taille des troupeaux laitiers
est comprise entre 5 et 15 têtes composées en grande partie
de vaches de races croisée ou pure et cultivant entre 0,2 et 0,5 ha
de fourrages par vache.
Ces exploitations
ont été classées en trois groupes selon le niveau de
marge brute globale de la production animale par unité de Gros Bétail
bovine. Le premier est un groupe de tête constitué de 5 exploitations.
La marge brute réalisée oscille dans une fourchette qui va
de 2.885 à 3.635 Dh/UGBB avec une moyenne de 3.088 Dh. Le deuxième
est un groupe intermédiaire formé de 10 exploitations. Il a
pu obtenir un niveau de marge brute moyen de l’ordre de 2.350 Dh/UGBB, les
valeurs extrêmes correspondantes sont respectivement de 2.044 et 2.638
Dh. Le dernier est le groupe de queue. Il est composé de 5 exploitations
dont la marge brute varie entre 972 et 1.962 Dh/UGBB avec une moyenne de
1.570 Dh (Tableau 6).
Cette
classification permet de dégager des normes clés à partir
des résultats du groupe de tête et de mettre en relief les déficiences
du groupe de queue ainsi que les marges de progrès dont il dispose.
L’analyse des indicateurs technico-économiques de gestion des troupeaux
permet de faire ressortir ces normes.
Facteurs de différentiation de la
productivité des élevages laitiers
La capacité
de production du groupe de tête est très proche de celles des
autres groupes. L'écart entre les groupes extrêmes en terme
de superficies cultivées est de 7 ha et de seulement de un ha au niveau
des superficies fourragères. La taille des troupeaux laitiers et leur
composition (part des races locales) est quasiment la même pour les
trois groupes. Pourtant, le volume de la production et la productivité
des vaches laitières du premier groupe représentent le double
de ceux du groupe de queue. Certes, la taille du troupeau laitier de ce dernier
est de 6,45 vaches contre 8,1 vaches pour le groupe de tête (Tableau 7). Cet écart de 1,65
vache engendre une différence de production de 3.036 litres. Cependant,
c’est la disparité en terme de productivité qui différencie
le plus ces deux ensembles. La moyenne économique du premier dépasse
de 1000 litres celle du groupe de queue. Elle est respectivement de 2.849
litres et de 1840 litres. Elle est à l’origine d’un écart de
production d'environ 8.200 litres par exploitation. Le «lait économique»
distingue également ces deux groupes. Celui du premier est de 1951
litres contre 1245 pour le dernier groupe, soit un écart de 706 litres
par vache. Cet indicateur reflète à la fois un degré
d’intensification plus élevé et une meilleure valorisation des
aliments concentrés par les troupeaux laitiers du premier groupe. Celui
ci achète plus d’aliments concentrés que le dernier. Il distribue
1284 kg par vache contre 939 pour le groupe de queue. Cependant en raison
de la faiblesse de la productivité des vaches du dernier groupe, il
doit utiliser 0,52 kg de concentrés pour produire un litre de lait,
contre seulement 0,45 kg par le groupe de tête.
La faiblesse
de la productivité des vaches du dernier groupe s’explique également
par un chargement plus élevé des superficies fourragères
et par des rendements insuffisants de son système fourrager. Elle
est le résultat d'une inadéquation entre la taille du troupeau
bovin et les disponibilités en fourrages verts. En effet, le groupe
de queue dispose de 5 vaches par hectare année fourrage contre 4,8
vaches pour le groupe de tête. Il produit 35,5 tonnes de matière
verte par hectare contre 45,7 tonnes par le groupe de tête.
La faible
rentabilité des élevages laitiers du dernier groupe est due
également à un taux de mortalité des veaux particulièrement
élevé: 17% contre 9% seulement pour le groupe de tête.
Ce résultat traduit une mauvaise gestion en terme de prophylaxie et
de soins apportés aux animaux, en particulier les jeunes.
L’âge
moyen des vaches en lactation est relativement bas dans le groupe de tête
(3,7 années contre 4,7 dans le groupe de queue). Il s’explique en
partie par l'introduction de nouvelles races améliorées au
détriment de la race locale qui ne dépasse pas 0,2% des effectifs
bovins. Son taux de réforme des animaux est deux fois plus élevé
que celui du groupe de queue. Cependant, il est à souligner que la
réforme des animaux dépend étroitement de la conjoncture
climatique et par conséquent de la trésorerie disponible pour
faire face aux besoins d'alimentation des troupeaux (achats de paille et
de concentrés). Il en résulte que les taux obtenus par chacun
des trois groupes sont à considérer avec prudence, car il ne
s’agit probablement pas de décisions stratégiques mais plutôt
tactiques.
Facteurs de différentiation de la
rentabilité des élevages laitiers
Le groupe
de tête est le plus compétitif. Il obtient le prix revient du
lait le plus bas. Celui ci est seulement 1,42 Dh contre 2,68 Dh pour le groupe
de queue. En haute lactation, les gains du premier groupe sont de 1,32 Dh
par litre alors que le groupe de queue couvre à peine ses coûts
de production. En basse lactation les gains sont respectivement de 1,82 Dh
et de 0,56 Dh.
Les recettes
du lait du premier groupe représentent le double de celles du dernier
groupe. L’écart est plus faible dans les ventes d’animaux. Il provient
de la vente d’un nombre plus important d’animaux de réforme et surtout
de taurillons et de génisses produits à partir de veaux nés
sur l’exploitation. Il est par conséquent le résultat direct
d’un faible taux de mortalité des veaux, du remplacement des vaches
de race locale par celles de race améliorée et d’une alimentation
meilleure et par conséquent plus coûteuse.
Les frais
d’alimentation du premier groupe dépassent de 632 Dh par UGBB celles
du groupe de queue. Les concentrés et les fourrages connaissent les
écarts les plus élevés. Les élevages du dernier
groupe sont moins intensifs, la consommation de la paille y est la plus forte.